Il y a maintenant quelques semaines, nous avons décidé de mettre en avant SRX au travers d’un outil mis en place par Twitch appelé le Bounty Board.
Spoiler : C’est un échec. Mais il nous semblait intéressant de partager notre expérience, notamment auprès des autres développeurs intéressants qui souhaiteraient utiliser cet outil.
Qu’est-ce que le Bounty Board ?
Le Bounty Board est un outil qui permet de mettre en relation les diffuseurs de contenus sur Twitch, qui souhaitent avoir un retour financier de leur travail, avec les entreprises souhaitant mettre en avant un produit, qu’il soit lié aux jeux vidéo ou non.
Ainsi, il est représenté sous forme d’un tableau de gestion des deux côtés. Côté entreprise, celle-ci va pouvoir mettre en place des campagnes avec un budget, des objectifs à réaliser, une description du produit ainsi que des informations destinées aux diffuseurs de contenus qui accepteront la “mission”. L’entreprise choisira également quel type de diffuseur pourra visualiser et participer à la mission.

Les conditions
Pour pouvoir utiliser ce service, il faudra créer un compte Twitch developer au nom de l’entreprise. On aura alors directement accès à la console Twitch sur dev.twitch.tv pour paramétrer le compte et les campagnes. C’est également depuis cette console que vous pourrez enregistrer un jeu comme étant le vôtre en renseignant des preuves.
Ensuite, il faut faire attention à certains critères précis :
- Le budget minimal d’une campagne est de 5000$
- La durée d’une campagne est de minimum 5 jours
- Le lancement de la campagne doit se prévoir au minimum 4 jours à l’avance
- Vous ne pouvez pas personnaliser l’affichage de la mission au delà du message de 2000 caractères maximum destiné au streamer
- La mission s’effectue sur une base de minutes de remplissage des conditions (Ex: Faire quelques chose pendant 80 minutes). Par défaut le streamer doit effectuer la mission d’affilée
- Vous ne payez que pour une personne ayant regardé au moins 2 minutes de stream, ce qui coûtera par défaut 0,50$
Les manques de la plateforme
Une fois la campagne lancée, on se rend compte de certaines limitations :
- Il n’y a aucune notification de début de diffusion par un streamer
- Il n’y a pas d’accès direct à la liste des streamers ayant accepté la mission ni leur planning
- Il n’y a aucun détail de facturation qui concerne la devise ou les taxes. Ainsi “5000$” sera le seul chiffre que vous verrez jusqu’à la facture. Nous verrons plus tard que ceci pourra être particulièrement problématique
- Une fois un contenu diffusé, la console ne permet pas d’accéder aux rediffusions, à vous d’aller les trouver
Notre expérience
Les résultats en chiffres
Commençons par des chiffres, que nous pourrons ensuite comparer avec les résultats concrets :
- 337 streamers ont pu voir et accepter la mission
- Sur ces 337 diffuseurs potentiels, 43 streamers ont pu faire une vidéo sur SRX
- 26 240 spectateurs ont pu voir ne serait-ce que quelques secondes le jeu
- Sur ces 26 240 spectateurs, 15 067 ont regardé la diffusion au moins 2 minutes
- En tout, le cumul des minutes regardées est de 314 429
- 515 personnes ont cliqué sur le Call-To-Action qui était ici un lien vers la page Steam de SRX

Nos constats
Sur les 43 streams diffusés lors de la campagne, nous avons essayé d’en voir un maximum ce qui nous a permis de dresser deux tendances générales :
Tout d’abord, la “qualité” des streamers est très variable. En essayant d’être un maximum objectif, nous avons remarqué que certains streamers font des efforts pour s’intéresser au jeu, essayer d’y trouver des qualités mais aussi des défauts constructifs. Ils vont ainsi prendre le temps de vérifier les instructions fournies sur la mission et lors du jeu, regarder attentivement les différentes options possibles et tester des choses. Ces streamers sont les plus utiles en terme de feedback car ils agissent en tant que beta-testers. Ils auront également une tendance à jouer plus longtemps que le temps minimal de la mission afin d’explorer des parties qui pouvaient leur échapper.
Malheureusement, il y a également des streamers plus “pressés” qui auront tendance à ne pas se concentrer sur le jeu (on notera par exemple des streamers qui joueront au clavier et à la souris alors qu’il était recommandé à de multiples reprises d’utiliser une manette). Ces streamers vont souvent avoir des discussions avec le chat qui n’ont rien à voir avec le jeu histoire de passer le temps, voire ne rien dire du tout, aucun avis, aucun commentaire, pendant toute la durée de la session. On pourrait penser que le jeu est en cause mais nous avons pu observer que la plupart de ces streamers se référencent dans toutes les catégories de mission et enchaînent les durées minimales de jeu pendant plusieurs heures pour cumuler les missions et donc les récompenses.
Ensuite, nous avons pu constater que la présence d’un des membres de l’équipe dans le chat d’un streamer jouait un rôle essentiel. En effet, les streams les plus constructifs, les plus animés, étaient généralement ceux où l’on se présentait dans le chat comme étant les membres de l’équipe de développement, ce qui suscitait systématiquement un engouement et une curiosité bien supérieure aux streams où nous avons observé passivement. Cela permettra d’avoir des questions, feedback et interactions avec le streamer comme avec sa communauté.
Les erreurs liées à SRX
Soyons maintenant moins généraliste et tentons de comprendre ce qui a pu porter préjudice à SRX en particulier et qui ne sera donc pas valable avec n’importe quel autre jeu. Ici, nous avons pu noter 3 éléments qui ont pu influer sur le résultat de la campagne :
Tout d’abord, notre jeu était destiné à un public averti. En effet, bien qu’au moment de la campagne, nous avions des modes de jeu destinés aux joueurs qui ne sont pas habitués à des jeux au rythme soutenu, SRX n’en reste pas moins un jeu de course, et pas des plus faciles. Cela a eu pour conséquence de ne pas montrer un gameplay très attirant pour les communautés des streamers qui avaient du mal. Au point de parfois donner l’impression que le jeu était lent et bugué. Pour combler ce problème, nous aurions peut-être pu affiner les critères de diffusion de la mission ou tout simplement demander à ce que le diffuseur regarde une vidéo de gameplay réalisée par l’équipe. Toujours est-il que nous avons eu certains retours négatifs liés au manque de skill de certains streamers. C’est de notre faute, pas la leur.
Ensuite, nous aurions dû présenter une navigation plus claire au sein même du jeu. La disposition de nos menus et les différents modes de jeux répartis dans des sous-menus a mené certains streamers à se perdre et ne profiter que d’une partie du jeu. Le délai était assez court durant la campagne pour revoir entièrement la hiérarchie de la navigation, nous avons donc subi cette erreur pendant toute la campagne et pris le temps de revoir cela une fois celle-ci terminée.
Enfin, nos objectifs et consignes pour la mission du Bounty Board étaient trop simplistes. Mis à part une consigne liée au fait que l’utilisation d’une manette était fortement recommandée, la mission consistait tout simplement à “Jouer 30mn à SRX”. Alors même que nous proposions différents modes de jeu, la possibilité de jouer en ligne ou en solo, sur différents circuits et épisodes, avec un tutoriel. A posteriori, cela combiné avec notre problème de navigation, nous aurions dû lancer cette campagne avec une version du jeu plus linéaire, présentant moins d’options et donc moins de risques pour le joueur de se perdre dans les modes de jeu, d’autant plus qu’il n’était pas logique de tous pouvoir les tester en seulement 30mn.
La petite anecdote de la facturation (faites attention)
Le programme Bounty Board de Twitch est, au moment de cet article et de notre campagne, disponible dans 5 pays du monde :
- Les Etats-Unis
- Le Canada
- Le Royaume-Uni
- L’Allemagne
- La France
Rappelons ici que nous sommes français et que Twitch appartient à Amazon, une entreprise dont la maison mère est aux Etats-Unis. La devise y est le dollar américain $ (USD) tandis qu’en Europe nous utilisons l’euro € (EUR). En règle générale depuis quelques années, 1€ vaut entre 1.10$ et 1.20$.
Lorsque vous utiliserez le Bounty Board, la seule devise que vous verrez sera le dollar américain (USD / $), même si vous êtes étranger. Nous avons utilisé le budget minimal pour ce service soit 5000$. En prenant 1€ = 1.15$, cela signifie que notre budget était d’environs 4350€. Rappelons qu’il ne sera jamais mentionné la prise en compte des taxes lors du remplissage du budget.
Et bien quelques semaiens après la fin de la campagne (en étant nous-mêmes allés prévenir que nous n’avions pas payé) nous avons reçu uen drôle de facture :
- Tout d’abord, celle-ci était contenue dans un mail ne faisant aucune mention de Twitch mais seulement d’Amazon, ce qui peut porter à confusion
- Ensuite, celle-ci avait été envoyée par Amazon France
- Amazon France étant une entreprise française, elle a converti la somme de 5000$ en 5000€ sans aucune conversion
- Elle est également partie du principe que c’était le montant hors taxes. Les taxes étant de 20% en France, la facture était donc de 6000€
Après un dialogue avec Amazon US nous avons pu obtenir une rectification de la facture, renvoyée cette-fois en dollars, que nous avons réglée en appliquant nous-mêmes le taux de conversion actuel.
Conclusion et mise à jour B3.3
Comme mentionné au tout début et en regardant les chiffres et résultats directs des ventes après la campagne, c’est un échec. Mais est-ce que l’on peut en tirer des conclusions positives et constructives ? Oui, comme souvent. Ces conclusions concernent beaucoup d’aspects du jeu, que ce soit le gameplay, le visuel, la navigation, mais aussi notre manière de voir le jeu et de travailler.
En ce qui concerne SRX, la conclusions directe se traduit par les mises à jour B3.3 et prochainement B3.4 qui apporteront des changements assez drastiques à certains éléments du jeu. Pour en savoir plus, n’hésitez pas à jeter un oeil à l’article sur la mise à jour B3.3 en cliquant sur ce lien :
Pour ce qui est des conclusions sur la manière dont nous travaillons sur nos jeux et lors des phases de création et de réflexion, nous ne les partagerons pas ici.
En revanche, une des conclusions positives est l’existence même de cet article, qui permettra nous l’espérons à d’autres développeurs de mieux comprendre le service Bounty Board avant de se lancer. Ce genre de retour nous aurait bien aidé mais il faut bien que quelqu’un se lance avant les autres.
À bientôt !